Marwa, 32 ans : « le Samusocial, c’est bien mais ça ne remplace pas un chez-soi »
21/02/2024
Marwa a grandi au Maroc. Maman d’un petit garçon, elle prévoyait de rejoindre son père, parti en France. En attendant, mère et fils vivent dans la belle-famille. Mais la cohabitation au sein de cette famille traditionnelle et stricte s’avère difficile, et Marwa est empêchée d’atteindre ses objectifs professionnels – elle veut devenir policière. Les quitter revient à quitter le papa de son fils. Tant pis, elle se met en quête d’un avenir meilleur en Belgique. Elle y rencontre un homme, le père de sa fille. Mais, après avoir fui la frilosité d’une famille quant aux projets professionnels d’une femme, elle se heurte cette fois à la violence d’un homme.
« Un jour, j’avais trop mal, c’était trop dur. Je suis sortie de la maison, j’ai fait une crise, je suis tombée. Quelqu’un a appelé la Police. Mais le même jour, je suis retournée à la maison… et les problèmes ont recommencé. Je suis retournée à la Police. Il fallait que je m’en aille, avec la petite. Ils ont contacté le Samusocial. On a pu s’installer ici.
Au début, c’était difficile. La petite pleurait beaucoup. Son papa lui manquait. Elle sentait qu’elle avait changé d’endroit. Mais elle s’est habituée. Elle continue de refuser la nourriture qu’on lui propose ici. Alors je l’allaite encore, alors qu’elle a deux ans.
Bien sûr, il y a des trucs négatifs. Le Samusocial, c’est bien, pour ne pas être dehors. Mais ça ne remplace pas un chez-soi. Quand tu n’as pas de maison, pas de travail, pas d’argent, c’est compliqué.
Actuellement, j’ai besoin de vêtements chauds pour ma fille. Ma voisine de chambre, dont la fille a grandi, m’a donné des chaussures. Si au Samusocial, ils ne donnaient pas les couches et les lingettes, comment ferais-je ? Ils me font oublier beaucoup de choses. Je sais qu’il y a des gens qui ont plus de problèmes que moi.
Je n’ai pas de papiers pour le moment. J’ai fait une demande de soutien financier au CPAS, qui a été refusée. Il faut que l’Etat arrête d’interdire le travail des personnes sans papiers. Qu’est-ce qu’on va donner à nos enfants ? Trop de gens souffrent, voire meurent ainsi. Mon seul espoir, c’est que le papa de ma fille la reconnaisse, je pourrai alors être régularisée dans le cadre du regroupement familial, travailler, et faire venir mon fils. Je pense beaucoup à lui, qui est loin de moi. Il est resté au Maroc, et grandit avec ses grands-parents paternels.
Je suis au Samusocial depuis le mois de juillet. Si je n’étais pas au Samusocial ? Je n’en sais rien, je ne connais personne, à part mon ex. Maintenant, j’arrive à bien parler avec la psychologue. Je me sens bien. Je fais de l’ergothérapie, de la danse, du sport. Et je vois bien que la vie est belle. Cela m’aide à penser que les choses vont s’arranger.»
Février 2024 : l’ex-compagnon de Marwa a reconnu sa fille. Marwa a pu entamer les démarches pour être régularisée. Elle se mettra ensuite un quête d’un emploi, puis d’un logement.